Sources : Dossier élèves IUP Valence : CHATELAN Nadège, DURAND Aurore, DURAND Elisabeth, FAYET Jonathan, in "Les mouvements de capitaux, quelle efficacité ?" 2003

 

Les institutions financières internationales doivent fonctionner démocratiquement et de façon transparente. Pour cela, il faut réviser radicalement la répartition du pouvoir au sein de leur conseil d'administration, mettre en place les procédures de contrôle nécessaires (en particulier par les parlements) et des mécanismes de recours indépendants, de façon à permettre aux populations affectées par leurs politiques d'obtenir réparation.


¢ Des solutions envisagées ?

- Limiter les incitations perverses :


Il est impératif de reconnaître les incitations perverses pour procéder à une réforme efficace de l'édifice financier international. Il faut alors, pour instaurer un système financier stable véritablement réformé, tenir compte de ces incitations, y remédier ou du moins minimiser leurs effets. Si les incitations perverses restent en place, toute tentative de réforme est vouée à l'échec. En conséquence, l'adoption d'une ligne d'action conçue pour limiter les incitations aux prises de risques doit être l'un des objectifs prioritaires de la réforme, étant donné que cela aura pour effet de stabiliser le système financier international et de limiter le nombre et la gravité des crises financières.
Si la limitation des incitations perverses au niveau national est primordiale, il convient également d'entreprendre des réformes au niveau international. Les organismes internationaux tels que le FMI, qui accentuent " involontairement " les incitations perverses, doivent faire l'objet d'une attention particulière. Une mesure possible susceptible de réduire le nombre d'opérations de sauvetage et de faire en sorte qu'on ne puisse plus compter sur elles à l'avenir, ce qui atténuerait de ce fait l'aléa moral*, consisterait à limiter les fonds octroyés au FMI. Ces mesures qui réduisent l'aléa moral ont pour effet de stabiliser les marchés financiers internationaux et ne sont donc pas isolationnistes, contrairement à ce que veulent bien affirmer les partisans de l'octroi de fonds au FMI. Au contraire, elles favorisent la mise en place d'incitations stabilisatrices et donc l'instauration d'un système financier international sain.

- Une meilleure communication avec les pays en voie de développement :


La légitimité politique du FMI et de la Banque Mondiale* doit être renforcée par une plus grande transparence des processus de décision, et notamment, une plus grande visibilité de l'implication des Etats-membres dans ce processus, et de la responsabilité des institutions vis-à-vis de ceux-ci. Au niveau local, la communication de ces organisations doit être développée, de même que leurs rapports avec la société civile. Ces réformes permettront d'atténuer l'image bureaucratique du FMI notamment.
Il est indispensable que les pays émergents soient davantage représentés et entendus au sein du FMI et de la Banque Mondiale. En effet, s'il apparaît normal que les principaux actionnaires des institutions exercent le plus d'influence sur la définition de leurs politiques, les pays émergents et les pays en voie de développement, qui constituent les principaux bénéficiaires des aides de ces institutions, doivent pouvoir faire entendre leur voix sur leurs modalités d'intervention. La légitimité du FMI a pu être mise en cause par certains pays du fait de la protection que ses interventions pouvaient accorder aux banques occidentales au cours de la crise asiatique, notamment en défendant trop longtemps les taux de change fixes. Ces critiques considèrent que le FMI et la Banque Mondiale ont été pris en otage par leurs principaux actionnaires et sont devenus l'instrument de la politique étrangère en général et américaine en particulier. Ces accusations apparaissent outrancières mais montrent les doutes qui planent sur l'action du FMI.
La Banque Mondiale et le FMI devraient agir en fonction des décisions de leurs actionnaires, c'est-à-dire des Etats. Or, force est de constater qu'aujourd'hui les instances de direction ne se réunissent jamais à un niveau politique et toujours à un niveau technique. Alors que les statuts du Fonds en prévoient la possibilité, il n'y a jamais eu de réunion du comité intérimaire du FMI au niveau ministériel. La France a donc proposé de réformer cette instance et de prévoir des réunions régulières des ministres compétents avec pouvoir de décision. Elle a également suggéré d'étendre cette réforme au comité de développement de la Banque Mondiale. A côté des conseils d'administration, les ministres donneraient ainsi les impulsions nécessaires et assureraient le contrôle démocratique des décisions.
Par ailleurs, il paraît nécessaire de faire participer davantage les pays pauvres aux discussions dans de tels organismes internationaux. Ainsi, comme le disait le président Chirac en septembre 1998 : " Nous devons associer plus étroitement les pays en transition, les pays émergents et les pays en développement à nos travaux. La crise financière actuelle montre que nous avons besoin aujourd'hui d'un dialogue approfondi entre tous, ainsi que d'un mécanisme de prise de décision qui donne aux marchés des signaux politiques forts et manifestes d'adhésion universelle à un système ouvert et sans exclusive ". Il convient de citer le mécanisme extrêmement complexe de représentation des Etats auprès de la Banque Mondiale. Si les grands Etats possèdent chacun un administrateur (Etats-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Chine, Fédération de Russie), les autres sont regroupés en circonscriptions élisant chacune un administrateur. Le continent africain élargi aux îles de l'océan indien ne dispose ainsi que de deux sièges. L'administrateur élu par les Pays-Bas représente aussi la Géorgie (et inversement puisqu'il y a rotation), celui de la Belgique, la Turquie, celui de l'Algérie vote en même temps au nom du Pakistan, ou encore celui de la Suisse pour la République kirghize. Il y a là un véritable défaut de représentation du Tiers Monde qui altère l'appropriation, chère aux dirigeants de la Banque Mondiale, par les Etats " bénéficiaires " des mesures proposées.

 

- Une clarification des compétences du FMI et de la Banque Mondiale :


Le spectacle des actions et des discours désordonnés voire contradictoires des institutions de Bretton Woods au cours de la crise asiatique montre la nécessité d'une clarification de la répartition des compétences entre le FMI et la Banque Mondiale et d'une réforme de grande ampleur des institutions financières internationales, encadrant de manière rigoureuse les compétences du FMI et de la Banque Mondiale.
Parmi ces propositions, le FMI pourrait réduire la durée de ses prêts et assouplir les conditionnalités qui y sont généralement associées. En effet, les conditions posées par le FMI apparaissent particulièrement contraignantes et renforcent souvent les conséquences sociales des crises sur les groupes de population les plus fragiles. Les prêts du FMI viseraient uniquement à permettre à un pays de surmonter le déséquilibre de sa balance des paiements, en évitant le défaut de paiement. Ces prêts seraient coûteux afin d'inciter les pays à mettre en œuvre les politiques économiques adaptées au rééquilibrage de la balance des paiements. Le rôle du FMI serait ainsi limité au court terme.
La Banque Mondiale continuerait en revanche d'être en charge des réformes structurelles à mettre en œuvre afin d'améliorer les conditions de fonctionnement des systèmes financiers, et prendrait également en charge la mise en place de filets de sécurité sociale et les mesures visant au maintien des dépenses en faveur de la santé et de l'éducation, afin que les contraintes de l'ajustement et des réformes structurelles ne conduisent pas à sacrifier le développement à long terme de l'économie. Cette répartition des rôles limiterait donc le FMI au rôle de surveillance des modalités de financement des économies et d'intervention en cas de crise, tandis que la Banque Mondiale regrouperait l'ensemble des compétences en matière d'aide au développement et de réformes structurelles, permettant d'accompagner les mesures nécessaires à l'ajustement des économies touchées par la crise.

La réforme des institutions financières internationales (par la redéfinition de leurs fonctions et de leurs organisations) est donc une condition nécessaire à la stabilisation du système financier international. Celui-ci ne pourra se stabiliser si les problèmes de transparence et d'incitations perverses subsistent. Ces problèmes pourront être combattus à la condition que le FMI et la Banque Mondiale s'accordent sur leurs actions et mettent en place des mesures fortes.

Le boom des entrées de capitaux dans les marchés émergents au début des années 1990 a posé d'importants problèmes de gestion macroéconomique. Dans cette perspective, les économies émergentes font face à un conflit d'objectifs du point de vue de la politique économique. D'un côté, il faut maintenir des taux d'intérêt élevés pour contenir l'inflation, et d'un autre côté, il faut ralentir l'appréciation du taux de change réel pour maintenir la compétitivité de l'économie.
Dans un tel contexte, un contrôle unilatéral se justifie lorsque les autres instruments de politique économique ont épuisé leurs effets.